Ghréline

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La ghréline est une hormone digestive qui stimule l’appétit[1] : son taux est élevé avant les repas et diminue à mesure que l'estomac se remplit. Elle est considérée comme l’antagoniste de la leptine, hormone produite par les adipocytes, qui induit la satiété lorsque son taux augmente.

La ghréline est produite et sécrétée principalement par les cellules P/D1 du fundus de l’estomac humain, et, secondairement, par les cellules Epsilon du pancréas.

La ghréline est également produite dans le noyau arqué de l’hypothalamus moyen, où elle stimule la sécrétion de l’hormone de croissance (« GH ») par la glande hypophyse antérieure [2]. À la suite de certaines chirurgies gastriques, les taux moyens post-absorption et post-prandial de ghréline diminuent, entraînant une satiété plus rapidement qu’en temps normal (i.e. : sans la déviation gastrique).

Les récepteurs de la ghréline sont exprimés par les cellules neuronales du noyau arqué de l’hypothalamus moyen et de l’hypothalamus ventromédian. Ce récepteur de type métabotropique couplé aux protéines G (GPCR), plus précisément, il s’agit du récepteur sécrétagogue de l’hormone de croissance (GHS). La ghréline joue un rôle significatif dans la neurotrophie, en particulier au niveau de l’hippocampe, et elle est essentielle dans l’adaptation cognitive aux changements d’environnements et dans les processus de l’apprentissage[3]. Récemment, il a été démontré que la ghréline pouvait activer l’isoforme « endothéliale » de l’oxyde nitrique synthase, dans une voie métabolique qui dépend de plusieurs kinases, incluant la sérine/thréonine kinase Akt. Chez le fœtus, il semble que la ghréline est produite précocement par les poumons, en en stimulant la croissance[4].

Histoire et nom[modifier | modifier le code]

La découverte de la ghréline a été faite par le chercheur Masayasu Kojima et ses collègues en 1999[5]. Le nom de l'hormone est basé sur son rôle de peptide activant la sécrétion de l'hormone de croissance, dont la racine serait ghre[réf. nécessaire], qui veut dire « grandir ».

Biochimie[modifier | modifier le code]

Isoformes[modifier | modifier le code]

La ghréline existe dans une forme endocrinologiquement inactive (peptide « pur ») et dans sa forme active (octanoylée) (voir Hexatropine). D'autres chaînes latérales que l'octanoyl ont également été observées.

Mécanismes d'action[modifier | modifier le code]

La ghréline fut la première hormone de régulation de l'appétit à être découverte. La ghréline et les mimétiques synthétiques de la ghréline (GHS) augmentent la prise alimentaire et augmentent la masse adipeuse[6],[7] par une action exercée au niveau du noyau arqué de l'hypothalamus[8],[9], incluant les neurones sensibles au neuropeptide orexigénique Y (NPY)[10]. La sensibilité de ces neurones à la ghréline est à la fois leptino-insulino-dépendante[11]. La ghréline active aussi la voie métabolique mésolimbique-cholinergique-dopaminergique, le circuit de récompense qui communique des signaux hédonistes et de type renforcement positif lié au substrat, comme pour la nourriture, les drogues à forte dépendance ou l'alcool[12],[13],[14].

Modèle animal[modifier | modifier le code]

Les modèles sur les animaux de laboratoire indiquent que la ghréline pénétrerait dans l'hippocampe depuis la circulation sanguine, stimulant les facultés de la mémoire et de l'apprentissage [15]. Ainsi, il est suggéré que l'apprentissage serait plus efficace durant la journée, quand l'estomac est vide, car les concentrations de ghréline sont plus élevées. Chez les rongeurs, les cellules imitant les cellules X/A-like produisent la ghréline. En 2011, on démontre chez la souris que la sécrétion de ghréline par les cellules de l'estomac est stimulée par le goût amer, expliquant de ce fait l'action stimulante de l'appétit de certaines boissons apéritives[16].

Relation avec l'obestatine[modifier | modifier le code]

L'obestatine est une hormone découverte à la fin de l'année 2005, qui diminue l'appétit. La ghréline et l'obestatine sont codées par le même gène, le propeptide initial se brisant pour donner naissance aux deux hormones[17]. La raison de cette même origine génétique pour deux hormones antagonistes demeure inconnue.

Pathologies reliées[modifier | modifier le code]

Obésité[modifier | modifier le code]

Les taux plasmatiques de ghréline chez les individus obèses sont moins élevés que chez les individus de poids santé IMC. Yildiz et al. ont prouvé que le taux plasmatique de ghréline augmentait entre minuit et l'aurore chez les individus ayant un poids santé, ces découvertes suggérant une hypothétique faille dans le cycle circadien des individus obèses[18].

Le professeur Cappuciio, de l'Université de Warwick, a récemment découvert que la privation de sommeil pouvait conduire à l'obésité. En effet, un manque de sommeil entraîne une production accrue de l'hormone ghréline, qui stimule l'appétit et ce manque de sommeil causerait aussi une diminution de la production de leptine, qui supprime l'appétit. Toutefois, cette étude n'explique pas les faibles taux plasmatiques de ghréline que l'on retrouve dans la population des individus obèses.

Anorexie[modifier | modifier le code]

Les individus souffrant d'anorexie mentale semblent avoir un taux plasmatique de ghréline plus élevé. Ces découvertes suggèrent que la ghréline n'est pas impliquée dans la pathophysiologie de ce trouble alimentaire. Au contraire, cette hormone semble plutôt tenter de « corriger » la situation, en quelque sorte.

Cancer[modifier | modifier le code]

Article principal : Cancer.

Les niveaux de ghréline sont également plus élevés chez les patients cachéxiques, d'étiologie cancéreuse[19].

Syndrome Prader-Willi[modifier | modifier le code]

Le syndrome Prader-Willi est aussi caractérisé par une hausse accrue de la concentration plasmatique de ghréline, parallèlement à une prise alimentaire très importante[20].

Une étude a démontré que la déviation gastrique chirurgicale, en plus de réduire la capacité volumique gastrique pour la nourriture, diminue significativement les niveaux plasmatiques de ghréline[21].

Vaccin anti-obésité[modifier | modifier le code]

Un vaccin anti-obésité, dirigé spécifiquement contre la ghréline est en cours de test[22],[23]. Ce vaccin utilise le système immunitaire, notamment les anticorps, afin de se lier aux molécules désirées, dirigeant en quelque sorte le système immunitaire contre son propre corps. Cela empêcherait la ghréline d'atteindre le système nerveux central (SNC), produisant en théorie une diminution de l'appétit, et du poids de l'individu obèse.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

  • leptine, hormone dite "de satiété"

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) A Inui, A Asakawa, CY Bowers et al, « Ghrelin, appetite, and gastric motility: the emerging role of the stomach as an endocrine organ », The FASEB Journal, vol. 18, no 3,‎ , p. 439-56 (PMID 15003990, DOI 10.1096/fj.03-0641rev, lire en ligne).
  2. (en) M.S. Mondal, Y. Date, H. Yamaguchi, K. Toshinai, T. Tsuruta, K. Kangawa et M. Nakazato, « Identification of ghrelin and its receptor in neurons of the rat arcuate nucleus », Regul. Pept, vol. 126,‎ , p. 55-59 (DOI 10.1016/j.regpep.2004.08.038).
  3. « Hunger hormone tied to learning » (consulté le 1er juin 2007) at The Scientist
  4. (en) M. Santos, P. Bastos, S. Gonzaga, J.M. Roriz, M.J. Baptista, C. Nogueira-Silva, G. Melo-Rocha, T. Henriques-Coelho, R. Jr Roncon-Albuquerque et al., « Ghrelin expression in human and rat fetal lungs and the effect of ghrelin administration in nitrofen-induced congenital diaphragmatic hernia », Pediatr Res, vol. 59, no 4,‎ , p. 531-7 (PMID 16549524, lire en ligne).
  5. (en) M. Kojima, H. Hosoda, Y Date, M Nakazato, H. Matsuo et K. Kangawa, « Ghrelin is a growth-hormone-releasing acylated peptide from stomach », Nature, vol. 402, no 6762,‎ , p. 656-60 (PMID 10604470, lire en ligne).
  6. (en) S. Lall, L.Y. Tung, C. Ohlsson, J.O. Jansson et S.L. Dickson, « Growth hormone (GH)-independent stimulation of adiposity by GH secretagogues », Biochemical and Biophysical Research Communications, vol. 280, no 1,‎ , p. 132-138 (PMID 11162489).
  7. (en) M. Tschöp, D.L. Smiley et M.L. Heiman, « Ghrelin induces adiposity in rodents », Nature, vol. 407, no 6806,‎ , p. 908-913.
  8. (en) A.K. Hewson, « Systemic administration of ghrelin induces Fos and Egr-1 proteins in the hypothalamic arcuate nucleus of fasted and fed rats », J Neuroendocrinol, vol. 12, no 11,‎ , p. 1047-1049 (PMID 11069119).
  9. (en) S.L. Dickson, G. Leng et CAF Robinson, « Systemic administration of growth hormone-releasing peptide activates hypothalamic arcuate neurons », Neuroscience, vol. 54, no 2,‎ , p. 303-306 (PMID 8492908, DOI 10.1016/0306-4522(93)90197-N).
  10. (en) S.L. Dickson, « Induction of c-fos messenger ribonucleic acid in neuropeptide Y and growth hormone (GH)-releasing factor neurons in the rat arcuate nucleus following systemic injection of the GH secretagogue, GH-releasing peptide-6 », Endocrinology, vol. 138, no 2,‎ , p. 771-777 (PMID 9003014).
  11. (en) A.K. Hewson, « The rat arcuate nucleus integrates peripheral signals provided by leptin, insulin, and a ghrelin mimetic », Diabetes, vol. 51, no 12,‎ , p. 3412-3419 (PMID 12453894).
  12. (en) E. Jerlhag, « Ghrelin Stimulates Locomotor Activity and Accumbal Dopamine-Overflow via Central Cholinergic Systems in Mice: Implications for its Involvement in Brain Reward », Addiction Biology, vol. 11, no 1,‎ , p. 45-54 (PMID 16759336).
  13. (en) E. Jerlhag, « Ghrelin administration into tegmental areas stimulates locomotor activity and increases extracellular concentration of dopamine in the nucleus accumbens », Addiction Biology, vol. 12,‎ , p. 6-16 (PMID 17407492).
  14. (en) A.K. Hewson, L.Y. Tung, D.W. Connell, L. Tookman et S.L. Dickson, « The rat arcuate nucleus integrates peripheral signals provided by leptin, insulin, and a ghrelin mimetic. », Diabetes, vol. 51, no 12,‎ , p. 3412-3419 (PMID 12453894).
  15. (en) Learning and memory stimulated by gut hormone | Science Blog
  16. (en) S. Janssen et I. Depoortere, Bitter taste receptors... [1]
  17. (en) J Zhang, P. Ren, O. Avsian-Kretchmer, C. Luo, R. Rauch, C. Klein et A. Hsueh, « Obestatin, a peptide encoded by the ghrelin gene, opposes ghrelin's effects on food intake », Science, vol. 310, no 5750,‎ , p. 996-9 (PMID 16284174, lire en ligne).
  18. (en) B. Yildiz, « Alterations in the dynamics of circulating ghrelin, adiponectin, and leptin in human obesity », Proc Natl Acad Sci U S A, vol. 101, no 28,‎ , p. 10434-9 (PMID 15231997, lire en ligne).
  19. (en) J. Garcia, « Active ghrelin levels and active to total ghrelin ratio in cancer-induced cachexia », J Clin Endocrinol Metab, vol. 90, no 5,‎ , p. 2920-6 (PMID 15713718, lire en ligne).
  20. (en) A. Goldstone, E. Thomas, A. Brynes, G. Castroman, R. Edwards, M. Ghatei, G. Frost, A. Holland, A. Grossman et al., « Elevated fasting plasma ghrelin in prader-willi syndrome adults is not solely explained by their reduced visceral adiposity and insulin resistance », J Clin Endocrinol Metab, vol. 89, no 4,‎ , p. 1718-26 (PMID 15070936, lire en ligne).
  21. (en) D. Cummings, « Plasma ghrelin levels after diet-induced weight loss or gastric bypass surgery », N Engl J Med, vol. 346, no 21,‎ , p. 1623-30 (PMID 12023994, lire en ligne).
  22. Scripps.edu - 'Scripps Research Scientists Successfully Test New Anti-Obesity Vaccine' at The Scripps Research Institute.
  23. [http://www.pnas.org/cgi/content/full/103/35/13226 From the Cover: Vaccination against weight gain - Zorrilla et al. 103 (35): 13226 - Proceedings of the National Academy of Sciences.