Que cache le nouveau documentaire d’Arte sur le jeûne ? Cette enquête dévoile les omissions, les biais scientifiques et la vision idéaliste des réalisateurs.

Sommaire de l’enquête – 6000 mots
1. Promesses, prudence et ambiguïté
[Partie réservée aux abonnés 🔒]
2. Stéphane et la cure de luxe
2.1 Buchinger : le jeûne haut de gamme
2.2 Une cure à 1200 € le kilo !
3. La « science » selon Buchinger
3.1 Un centre pour aspirer les kilos
3.2 Aucun risque pour la santé ?
4. Faut-il compter les heures ou les calories ?
4.1 Les honneurs avec les rongeurs
5.La vérité sur les vertus du jeûne intermittent
5.1 Neutraliser la perte de poids
5.2 L’effet neutre du jeûne intermittent ?
5.3 Les méta-analyses et méta-déceptions ?
6. Les pompiers et l’expérience bien trop flatteuse
7. Valter Longo, la science et le business
8. Pourquoi faire 3 repas par jour
9. L’histoire des bunkers et de l’appétit
10. Conclusion – Le jeûne selon Arte : séduisant, incomplet, partial
Ils ont remis le couvert ! Enfin, c’est une façon de parler puisqu’on parle du jeûne thérapeutique et intermittent ! Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade à l’origine du premier documentaire emblématique d’Arte sur Le jeûne : une nouvelle thérapie rempilent une décennie plus tard.
Nos deux réalisateurs à succès décident de refaire le point après plus de 10 années de recherches scientifiques où l’on retrouve des « bienfaits désormais avérés » dans le monde du cancer ou de la rhumatologie.
Ce second volet Le jeûne, enquête sur un phénomène est en ligne sur YouTube depuis janvier 2025. Il approche le million de vues avec des commentaires élogieux de pratiquants et de professionnels de santé.
J’ai vu plusieurs fois le documentaire. La réalisation est bluffante, captivante et nous propose de suivre l’épopée de personnes lambda qui expérimentent les bienfaits du jeûne sur la santé. Sylvie Gilman et Thierry de Lestrade n’ont bien sûr pas oublié les personnalités scientifiques les plus emblématiques.
Valter Longo, Satchin Panda et Mark Mattson sont des pionniers dans la création de connaissances scientifiques sur le jeûne, le cancer et les maladies métaboliques dites de civilisations.
Et je connais très bien ces chercheurs, et ce sujet. J’ai été l’un des premiers blogs francophones à populariser leurs découvertes et travaux sensationnels sur le jeûne intermittent. C’est peut-être l’un des sujets que je connais le mieux.
Le problème est là. Les documentaires d’Arte apparaissent souvent exceptionnels pour des néophytes qui découvrent une thématique quand ils soulèvent d’innombrables questions et étonnement dès lors qu’on maîtrise le sujet.
C’est un peu le syndrome « Cash Investigation ». Tous les reportages sont édifiants jusqu’à ce que le sujet touche votre domaine de compétence.
Promesses, prudence et ambiguïté
Que vaut réellement le dernier documentaire d’Arte sur le jeûne thérapeutique et intermittent ? Tous les articles grand public saluent la prudence des réalisateurs et l’expression claire des limites.
Télérama rapporte un « décryptage équilibré sur une pratique en plein essor ».
Le Figaro nous livre ses impressions sur un documentaire « inédit, passionnant, très fouillé et remarquablement vulgarisé » dédié à la privation de nourriture.
Les éloges de la presse grand public ne sont pas vraiment étonnants. Peu de journalistes connaissent les détails, les limites et les fausses promesses de l’autophagie, par exemple. Alors je vous préviens que je ne vais pas tirer à boulets rouges sur nos réalisateurs et Arte par pur plaisir. Je vais vous présenter la partie immergée de l’iceberg sur ce sujet colossal.
Arte ne s’est pas rendue coupable d’une crasse désinformation, mais de subtiles omissions et de suffisamment d’ambiguïté pour créer un scénario extrêmement favorable aux jeûnes thérapeutiques et intermittents.
Le format n’invite pas à entrer dans le détail des controverses inesthétiques et visuellement ronflantes pour l’auditeur, et c’est un gros problème pour vous.
Cette mise au point est nécessaire, car des sujets majeurs sont abordés :
- le cancer
- les maladies métaboliques
- l’inflammation, l’arthrose ou la fibromyalgie
Une analyse pragmatique et détaillée est d’autant plus importante que l’aspect économique et quasi universel de la pratique est largement mis en avant. N’aurions-nous pas à la fois une solution de santé publique efficace et virtuellement gratuite ?
On va voir ensemble que les réalisateurs d’Arte sèment des promesses thérapeutiques comme on sème du pain à tout vent, en explorant superficiellement des travaux scientifiques et vous laissant en tirer toutes les conclusions (bonne ou mauvaise).
La réalisation n’aura pas jugé utile d’intégrer des voix discordantes, prudentes et mesurées, sur ce qu’on peut réellement attendre d’un jeûne.
Et pour mes futurs détracteurs, je suis un adepte du jeûne. J’essaie d’inclure une pratique scientifiquement fondée, sans prise de tête et sans attendre non plus monts et merveilles. Mais J’essaie autant que possible d’avoir un regard critique sur cette pratique (comme j’ai pu le faire avec la méthode Wim Hof) surtout en tant que pratiquant.
Alors abonnez-vous pour découvrir cette enquête inédite et soutenir un site d'information 100% indépendant. Des articles et analyses qui changent la vie.
N'oubliez pas, si c'est gratuit, c'est vous le produit ! Dur à Avaler ne bénéficie d'aucune subvention publique ni privée sans le moindre annonceur publicitaire !
Soutenez l'investigation indépendante !
Déjà inscrit ? Remplissez le formulaire ci-dessous.
8 commentaires
Ah lalala ! Je suis tellement contente de connaître ton travail. Et je regrette seulement de ne pas avoir le temps de m’y plonger entièrement à chaque nouvel article.
A nouveau, merci pour tout ce que tu fais.
Bonjour Sandrine,
Merci beaucoup pour votre commentaire :) Je suis bien conscient que mes enquêtes nécessitent déjà un certain temps pour les lire, mais peut-être encore plus pour les digérer et davantage si on veut les critiquer :D !
Mais impossible de faire court pour satisfaire les robots Google, tant pis pour le référencement, on rentre dans le détail !
Merci encore, ça motive vraiment pour continuer :)
Bravo pour cette analyse sans complaisance des faux espoirs entretenus par ces « marchands de bien-être » ! Pour ce qui est de Longo, j’avais publié un article sur les incohérences (et falsifications) de son « régime de longévité » (https://leti.lt/irjj)…
Il y a dans ton article une phrase incompréhensible : « Est-ce que j’avais de découvrir que la pratique est inutile au-delà d’une simple perte de poids ? »
Merci Bernard,
Je réalise que tu as toujours un coup d’avance sur moi et que je ne regarde vraiment pas assez tes articles que j’apprécie pourtant énormément.
Il manquait le mot « peur » dans la phrase qui effectivement lui faisait perdre un peu tout son sens. Merci de ta vigilance.
Au plaisir de te lire.
merci et suspense pour ma part! Je vais lire dès que possible. Je viens de faire un compte rendu aussi après visionnage; je suis curieuse de voir ce que vous avez repéré, vu qu’on a des filtres différents.
Bonjour Taty,
Votre retour sera plus qu’apprécié ! Mais cette enquête me permet moi-aussi de remettre ma propre pratique (je fais 24h de jeûne par semaine) en question pour les bénéfices qu’on peut en attendre.
Au plaisir de vous lire
Merci Jérémy!
Je crois avoir entendu quelque part qu’une étude montrait les inconvénients spécifiques (voire dangers?) du jeûne intermittent pour les femmes. J’ai rêvé?
Bonjour Julie-Axelle,
Non, tu ne rêves pas ! Je n’en parle pas précisément (l’enquête est déjà excessivement chargé) mais l’impact sur les hormones est très marqué surtout sur les plages horaires les plus restrictives avec des contre-indications assez clairs en cas de grossesse, lactation et dans l’objectif de concevoir un enfant. Pour les femmes, il semblerait que des plages horaires beaucoup plus douces devraient être envisagé (12 à 14h de jeûne, ce qui est globalement proche de ce qu’on fait déjà naturellement sans grignotage nocturne et dîner trop tardif). On peut noter des perturbations du cycles menstruels, de l’irritabilité, perte de cheveux, etc. Des contraintes surtout envisagé avant la ménopause, où les fluctuations hormonales sont les plus fortes.
On voit clairement que le jeûne intermittent n’est pas une solution unique adaptée à tous. Cela dépend de chacun, du sexe, de l’âge, du contexte métabolique et nutritionnel, des habitudes de vie et des objectifs qu’on souhaite atteindre (perte de poids ou calendrier plus libre sans manger…). Sans objectif clair de perte de poids pour chercher des améliorations métaboliques évidentes, le jeûne intermittent chez les femmes pré-ménopausées devraient donc faire l’objet d’une vigilance accrue !
En espérant avoir répondu à ton interrogation ! (et cela pourra faire l’objet d’un article à part entière !)